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| Sujet: Les écureuils de Central Park sont tristes le lundi ✘ Lexie|Ron|Sofia 11.06.12 14:47 | |
| Je suis le chef-d’œuvre d’un marchand d’esclave qui a fait de moi sa chienne. Rendue docile par la peine, j’enfante chaque jour d’une douleur nouvelle. Mes reins froids puent la misère d’avoir été si violemment éprouvés, Mes bras fatigués pulsent des courbes fines que le nouveau change. J’ai dans le crâne des tas d’erreurs, qui me démangent.
J’ai besoin que la laisse me lâche au cou et que la prise craque sur ma peau. Qu’un orage emmerde le ciel en le déchirant d’une révolution macabre. Que se mettent à pleuvoir les cadavres des rêves que l’on a abandonnés. Que nos consciences d’enfants nous visitent pour nous crier des injures. Qu’on me frappe, m’insulte ou me dise encore une fois « Je te jure. »
Mes fers aux poignets pèsent lourds dans mon combat contre la torpeur. J’hésite, titube et marmonne des horreurs à mon propre souffle rendu court. Le vide en mon ventre creuse une colère dans les épaisseurs de mes danses. Plusieurs étages de folie se disputent l’attention que mon fils accapare. Je lui souris un craquement intense depuis le fond de ma cage, évite mon image.
Mon visage dans ses yeux s’est assagi dans une fourbe hypocrisie. Le bordel dans ma tête chante le chaos que répète en chœur, mon maitre.
Je lui parle, son parfum me faisant taire un instant. Puis reprends une chanson que j’épelle sans doléance. Rien que les mots de ton père, chéri, le temps d’une danse.
Je le fais valser dans les airs, son petit corps ne pesant rien au bout du mien. Il rit une joie qui me percute avec les murs et j’oublie tout, même les injures.
Je laisse derrière nous un foyer que le soleil abreuve, mentant à mon égard. Mes yeux jurent que lui, me rendant belle oublie que je porte la folie en fard. Je me cache derrière les verres teintés d’un horizon griffé par mes soins. Mes mains serrées contre ses hanches, je confie nos vies à celles d’un autre.
Je lui souris un échange sincère qui perturbe mes habitudes en enfer. J’ai toujours aimé cet homme et ses yeux bienveillants conscients de mon mal. Il m’a vue nue, il m’a vue forte. Il m’a vue en tenue et à moitié morte. Et il me protège. M’impose. Me conseille. Se tait. Me dépose.
La poussette vide s’élance dans le parc sur un silence mouvant. Mon fils sur ma hanche, je déroge aux usages, cherchant un ange. Il la trouve avant moi et je suis son regard brillant d’une lueur infime. Un rien d’étoile dans les bijoux que le plus petit des sourires illumine.
J’enfonce mes escarpins dans l’herbe basse faite de caresses. L’ombre d’un arbre masque le visage qui avait manqué au mien. Je souris quand elle se retourne et écoute contre moi, un mot venu de loin. S’agitant, il lui tend les bras et parle avant moi, un mot qui n’existe pas.
─ Ah mon ange, tu veux bien le prendre avec toi ? Il s'agite dès qu'il te voit. Il t'a même trouvée le premier. Qu'est-ce que tu regardais là-haut ? |
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