Je ne sors plus, trop de choses à faire. Je travaille, je fais à manger, je m’occupe des filles. Six mois que ça dure. Je ne fais que ça. Ma vie tourne autour des filles, j’ai pris 20 ans, je suis une maman. Je ne vais plus chez le coiffeur, en fait, je ne me coiffe même plus. Je me brosse juste les cheveux de temps en temps, et encore, quand il fait beau. Je souris toujours, car les filles vont bien. Moi, je ne sais plus trop, je ne m’en occupe pas. Ca ne m’intéresse pas. Je pense à l’avenir, je mets de l’argent de côté. Sahara ira à l’université, et ce n’est pas sa mère qui va payer. Elle veut que sa fille apprenne à se débrouiller. Mais je m’en fiche, si elle ne veut pas être sa maman, je le serais. Sahara a le droit d’avoir une maman. Tout le monde en a le droit. Sauf moi.

Je ne sors que pour voir Charlie, pour respirer. Prendre un bol d’air avec un vrai ami, ou juste prendre un verre. On est là l’un pour l’autre, voila. J’appelle Chuck de temps en temps, juste pour m’assurer qu’il va bien. La maladie de son père lui a été fatale, je l’ai appris au JT. Alors j’appelle Chuck, de temps en temps, comme ça. Quant à Oxanna, elle est et restera toujours ma bouée de sauvetage, celle qui, sans même s’en rendre compte, parvient à éclairer ma vie avec un rien. Mais c’est Sahara et Emily, qui comptent vraiment. Mes frères passent de temps en temps. Ils font semblant de croire que je mûris, mais je sais ce qu’ils pensent. Ils s’inquiètent, alors qu'en réalité, je vais bien. Je ne suis pas triste, je suis juste abandonnée. Donc je m’accroche aux êtres qui m’entourent. Ma vie, c’est les autres.

Depuis six mois que Dean a disparu, mon quotidien, c’est de survivre à ma phobie : être abandonnée par quelqu’un que j’aime.