L'Ange des eaux - [ Ashley ]

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Parce que la première chose que je lui ai sortie était une connerie digne de moi.
C'est calme et serein que je remonte les rues qui me mènent à Central Park.
Puisque la seconde fois que je l'ai vue, la mort rodait dans le coin, perfide et sourde.
La paix m'envahit, la gratitude aussi. Il ne sera pas possible de faire pire que mes premiers mots.
Un aveu déplacé la première fois, un ordre dégouté la seconde. Et si j'arrêtais de parler, pour de bon ?

Direction le centre de la Bethesda Terrace, puisqu'Ashley en avait décidé ainsi.
Même si le choix du lieu pouvait lui sembler anodin, il ne l'était en rien à mes yeux.
Bethesda... de réputation la plus belle fontaine du Parc, abritait un ange. Parfait.
Une femme de métal, haute dans sa splendeur, munie d'une immense paire d'ailes.
Elle verra, cette figure intemporelle, à quoi ressemble un véritable ange, de nos jours.
Ses yeux figés caresseront le visage d'Ashley aujourd'hui, et elle l'envierait si elle pouvait.

Mes pas aveugles me mènent dans la bonne allée, je lève enfin les yeux vers l'horizon.
Elle se profile, là, éclatante dans toute sa beauté, la fontaine qui abrite l'Ange des eaux.
Le verrons-nous aujourd'hui ? Le chérubin aux prouesses multiples ? Je sens que oui.
Sa grâce enivrera l'éternel, et nous aurons le droit d'y toucher, rien qu'un instant.
Une seconde suffira, peut-être moins, pour laisser passer les messages que tairont mes lèvres.

Je n'approche pas la fontaine de trop près, maintient une distance entre nous et m'assieds.
N'importe quel banc fait l'affaire, je n'opte pas pour le plus près, j'ignore pourquoi.
Assis, j'attends. Il me suffira de ne pas la faire pleurer pour qualifier cette entrevue de réussie.

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J'avais fait au plus vite possible, mais je n'avais pas pu m'empêcher de me coiffer. C'était complètement idiot, puisque mes cheveux allaient s'emmêler à cause de l'écharpe et du vent. C'était vraiment bête, de perdre du temps pour ça.
C'est pourquoi c'était d'un pas rapide, comme pour rattraper mon retard, que je me rendis au parc. Je ne voulais surtout, surtout pas être en retard. Même si nous n'avions pas fixé d'heures, d'ailleurs. Mais quand même.
J'arrivais devant la fontaine en marchant à une telle vitesse que j'étais sûre de gagner les Jeux Olympiques de marche rapide, à ceci près que je n'avais pas leur démarche chaloupée que tout le monde trouvait ridicule. Il ne manquait plus que je sois ridicule quand je marchais, ça aurait été le pompon.
Je ralentis devant le monument et me mit à chercher le véritable ange, sans un regard pour la statue que j'avais déjà tellement vue. L'important, c'était Charlie, la fontaine n'était qu'un symbole.
Je fis deux fois le tour de la fontaine avant de me dire que j'étais peut-être arrivée la première finalement. Je me rendis compte en m'arrêtanr que j'étais essoufflée, mais je n'eus pas le temps de récupérer, parce que je l'avais repéré, assez loin, sur un banc.
Mon estomac fit un saut périlleux et libéra les papillons tandis que je me dirigeais vers lui toujours aussi rapidement, le sourire au lèvres. Comme toujours, il était sexy en diable avec des vêtements simples.
Le revoir dans d'autres conditions, hors du Starbuck n'avait plus du tout le même effet. Seule la joie prédominait. La joie et l'excitation. L'appréhension se cachait, prête à surgir en criant "Bouuuuh!!" à tout moment.
Mais là, je profitai du plaisir de le revoir, sans chercher à voir plus loin.
Il acceptait de passer du temps avec moi et c'était plus que je n'étais en droit d'espérer. Merci Charlie.

- Je suis contente que tu sois venu. Articulai-je en guise de bonjour, souriant si fort que j'en avais mal aux joues.

Et pourtant, je ne parvenais pas à le faire baisser en intensité. L'ange était là, c'était tout ce qui importait.

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J'attendais, mes mains pour seules comparses dans l'adversité.
Coude calé sur mon genou, mes doigts pianotaient contre mon pouce.
Même si je devrais regarder le monde dans les yeux, maintenant.
Tant pis, à croire que rien ne m'apprend. Contempler est pourtant à portée.
Me tourner vers l'origine des rires de deux gamins pas si loin de moi
ou regarder l'ange, pourquoi pas ? Mais non, je regardais ma foutue main.
Comme si elle allait m'apporter une réponse à une question muette.

Le passé enfouit sous le banc, j'ose un regard vers l'animation qui m'entoure.
L'ange déverse son flot, les passants vaguent à leurs occupations, le monde tourne.
Quelle surprise, oser regarder la vie pour n'en apercevoir que la banalité, finalement.
Il faudrait pouvoir détecter l'invisible à l'œil nu pour en apprécier la saveur.
Savoir lequel de ces cœurs est brisé pour pouvoir le réparer, alléger les peines.
Je me sens bien toutefois, perdu sans en avoir l'air. Les oiseaux me comprendront.

Un semblant de basse lointaine vient caler un sombre rythme contre mes tympans.
Voilà de quoi patienter, quand bien même serais-je assis depuis trente secondes à peine.

- Je suis contente que tu sois venu.

Je lève les yeux en reconnaissant la voix d'Ashley. Tout sourire, elle est resplendissante.
Le froid a coloré son visage visiblement claqué par le vent. J'admire la vie sous sa plus belle forme.
Je relève enfin le visage, me sentant bien sans remords, pour une fois.

- Moi aussi, j'avoue dans un sourire qui n'a rien de feint.

Je me laisse glisser jusqu'à une extrémité du banc pour lui offrir un siège.
A moins qu'elle ne préfère se promener. Un mot d'elle et je marcherai.

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Il leva d'abord les yeux m'offrant la vision de son magnifique regard, celui-là même qui m'avait rendu muette lors de notre première rencontre. Un regard noir, profond, que j'apprenais à lire, petit à petit. Mon plus beau sujet de littérature à ce jour, d'ailleurs.
Il leva ensuite le reste de son visage vers moi, lorsqu'il m'eut reconnu tout à fait.
C'était à nouveau, une nouvelle expression que je n'avais pas encore appris à identifier qu'il arborait, mais j'aurais juré que ça se rapprochait de la légèreté. Je ne pus m'empêcher d'espérer avoir un rapport avec ce sentiment qu'il avait l'air d'éprouver, même si je doutais fort que revoir une fille qui avait pleuré devant lui et qui l'avait obligé à rester dans une salle qu'il voulait quitter soit le meilleur moyen de se sentir léger.
Et pourtant :

- Moi aussi. Dit-il, accompagnant ses paroles de ce magnifique sourire dont j'étais presque devenue dépendante.

Mon coeur accéléra à nouveau, et il était clair que ça n'avait rien à voir avec la marche rapide.
Déjà il était content de me voir, contre toute attente. Je ne l'aurais pas cru même si un garçon venu du futur m'avait averti, ou qu'une voyante me l'avait prédis.
Pourquoi Charlie aurait-il était content de voir le boulet de l'ange?
Et pourtant, il avait l'air honnête. S'il y avait quelque chose que j'étais sûre de savoir lire chez Charlie, à présent, c'était bien son sourire. Et il s'agissait du véritable sourire, celui qui m'avait fait fondre dans un certain coffee-shop. Celui qui se diffusait jusque dans ses yeux et qui les faisait pétiller.
Je ne me rendis pas tout de suite compte que je me mordais la lèvre. En une moitié de phrase, un regard et un sourire, Charlie m'avait fait perdre tout contrôle. Et le pire, c'était qu'il ne devait même pas s'en rendre compte.
Il me laissa de la place sur son banc et je m'assis. A vrai dire, mes jambes étaient devenues du véritable caoutchouc tellement j'étais touchée par ce moment et adoratrice de son sourire.
Je ne savais pas quoi dire pour lancer la conversation, et pourtant, je trouvais normal que ce soit moi qui la lance, puisque c'était moi qui lui avait demandé de venir.
Je regardai rapidement autour de moi et mes yeux se posèrent sur l'étang. J'eus un petit sourire nostalgique. C'était mon tour de commencer par une anecdote, non?

- Quand j'étais petite, je venais souvent ici avec mon père. racontai-je en regardant toujours l'étang. Il laissait mes frères jouer au foot par ici et il m'emmenait faire du pédalo. Et une fois sur l'étang, il me racontait des histoires de princesses. Ça faisait longtemps que je n'étais pas venue de ce côté du parc. J'ai l'impression de le redécouvrir.

Je regardai Charlie puis je souris, gênée de m'être confiée, quelque part. Et contente en même temps. En fait, je ne savais pas vraiment ce que je ressentais à ce moment là, je me demandai même s'il n'y avait pas un peu de peur aussi : celle de l'ennuyait. Elle restait là malgré tout, tapie, mais présente, réelle.
Après tout, il n'en avait sûrement rien à faire. Avant qu'il ait pu réagir, je repris la parole.

- Tu es déjà venu, ici? Lui demandai-je, alors.

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Pendant ce qu'il me semble prendre plusieurs minutes, elle me regarde sans ciller.
Gêné, je ne saurais dire si elle ne veut s'asseoir ou regrette simplement d'être venue.
Moi aussi, j'étais content d'être venu, pas de la soumettre à ma présence.
J'avais juste le sentiment privilégié de passer un moment à ses côtés. C'est tout.
Mais parler n'est pas mon fort, ce n'est plus un secret, et deux mots me trahissent.
Je suis content qu'elle soit venue parce que j'ai sincèrement considérée la possibilité inverse.

Mais elle s'assoie et je brûle les films paranoïaques qui animent mes songes, encore.
Les cendres demeurent, bien évidemment puisque mes impressions sont là.

- Quand j'étais petite, je venais souvent ici avec mon père. Il laissait mes frères jouer au foot par ici et il m'emmenait faire du pédalo. Et une fois sur l'étang, il me racontait des histoires de princesses. Ça faisait longtemps que je n'étais pas venue de ce côté du parc. J'ai l'impression de le redécouvrir.

Je laisse le silence me dévorer parce que je ne serais jamais capable de répliquer à une confession.
Elle me touche néanmoins grâce à sa simplicité et son apparent désintérêt pour un remboursement.
On ne joue pas sur du donnant-donnant ici, du moins je me plais à le croire. Juste une anecdote.
Doucement, son passé à elle reflète le mien pourtant largement enfoui en ce jour. Mais il est trop tard.
Cela commence par trois fois rien, juste un petit regret qui vient pincer mon cœur, j'ai l'habitude.
J'aurais aimé m'embarquer avec mon père sur le lac, moi aussi et être assez vieux pour m'en souvenir.

- Tu es déjà venu, ici?

Hé non, je n'ai pas eu le loisir de zoner dans le parc des amoureux ou des égarés.
Pas même en étant les deux à la fois. Je n'ai aucun souvenir ici, et je les invente.
Je suis une cause perdue, qu'on ne s'essaie pas à me berner avec le contraire.
Mais je parviens toutefois à empoigner la lucidité qu'il me reste pour m'accrocher.
Cette réalité est belle et il faut que cesse la torture, au moins pour l'instant.

- Non, je réponds simplement.

Quel con l'aliéné quand il veut, tous les New-yorkais ont déjà foulé ce sol, c'est obligatoire.
Cette appellation ne me convient pas vraiment, je ne manque à aucun devoir, je crois.
Ma mère m'a donné naissance sur le territoire américain, soit, cela ne fait pas de moi un patriote.
Je souris en songeant que je bafoue jusqu'à mon propre pays, juste comme ça, pour faire chier.

- Pas très civique, je sais.

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Je n'attendais rien de cette question. Cette fois, j'avais décidé de laisser faire les choses. J'apprendrais à le connaître, il ne pouvait rester un inconnus pour toujours, quand même. Mais parce que finalement, le Destin me donnait une chance de rattraper nos deux dernières entrevues, c'est sans arrières-pensées que je posais cette question.

-Non. Répondit-il avant d'ajouter en souriant : Pas très civique, je sais.

Sa phrase me fit rire. Je ne voyais pas ce qu'il y avait de civique à se rendre dans un parc. Je n'avais jamais fait ça pour ça. C'était comme aller à la fête foraine, j'avais longtemps cru qu'il y avait une loi qui disait que chaque enfant de se rendre au moins une fois à la fête foraine. Pourtant, il était clair que ce n'était pas le cas.
Aller au parc par devoir, c'était trop triste. Surtout que l'idée me traversa que c'était peut-être par esprit de citoyenneté qu'il avait accepté de venir. Et s'il y croyait?
Mais non, j'étais bête... Avais-je déjà oublié son sourire? Aucune chance.
Un souvenir me percuta alors, et je m'en voulu de ne pas y avoir pensé avant. Ne m'étais-je pas fait une promesse, la première fois que l'on s'était vu?
Ne m'étais-je pas dit que je devais aider Charlie à retrouver son enfance? Ce parc était le berceau de mon enfance. Et si aujourd'hui, je faisais mon possible pour qu'un nouvel enfant s'amuse. Je savais que ce serait compliqué, mais le pire qu'il pourrait arrivé au fond, c'était que l'on passe un bon moment, non.

- Le plaisir n'est pas une affaire de devoir. Répondis-je en souriant à mon tour, réfléchissant au meilleur moyen de commencer.

Un coup d'oeil à l'étang élargit mon sourire. C'était bête comme chou, mais cette idée me plaisait tellement que je bondis de mon siège. Sur mes deux pieds, je tendis la main à Charlie et souris.

- Que penses-tu de découvrir les meilleurs endroits de ce coin, pour ta première fois, alors? Demandai-je avec un grand sourire.

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- Le plaisir n'est pas une affaire de devoir.

Ok Charlie, zéro pointé. Super les tentatives d'humour, on m'y reprendra.
Un New-Yorkais n'ayant jamais foutu les pieds à Central Park... ?
Central Park étant le berceau de la ville, l'endroit que tout le monde connait... ?
Pas très civique, le New-Yorkais qui ne connait pas le coeur de la Big Apple.
J'attends mais Ashley ne percute pas et j'en profite pour me sentir très seul et con.

Bien sûr que non, le plaisir n'est pas affaire de devoir. D'ailleurs il n'y a pas de lien.
Je n'ai jamais apprécié la contrainte et son affirmation me renvoie en prison.
Non, il ne faut pas s'aventurer sur cette pente que je sais trop raide. Je suis las.
En l'instant je ne suis plus le barman et pas tout à fait le taulard. Cela ne saurait tarder.
Parce que la dernière fois j'ai lâché un aveu immédiatement regretté. Bientôt...
Ouais, dans le cours de la journée elle va me demander d'éclaircir le trou.
Il serait normal qu'elle le fasse, peut-être même naturel. Mais je ne veux pas.
Pas de passé aujourd'hui, je reste en tête à tête avec moi. Ashley doit m'aider.

Cette fois il faut me prouver que je suis capable de regarder devant moi.
Arrêter de pleurer les actes manqués et surtout continuer à avancer.
Je n'y arriverai pas seul et son appui sera d'un grand secours.

- Que penses-tu de découvrir les meilleurs endroits de ce coin, pour ta première fois, alors?

Je jette un regard à sa paume offerte, ayant l'impression d'avoir quatre ans.
"Ta première fois"... génial me voilà puceau à présent. Et pour un parc en plus.
Elle me proposait directement d'entrer dans ma vie, sans s'en rendre compte.
Ashley me demande une place dans le coin souvenir en me faisant découvrir l'endroit.
Je ne sais pas, j'ai également besoin d'endroits isolés et neutres comme celui-ci.
Il me faut des refuges lointains où je n'irai jamais mais laisserai partir mes pensées.
Central Park sera l'endroit que m'a fait explorer l'ange blond que j'ai fait pleurer ?

- Comme un genre de visite touristique ? je souris en saisissant sa main.

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Tandis qu'il regardait ma main d'un air pensif, je réalisais qu'il ne voulait peut-être pas quitter ce banc. Après tout, s'il ne connaissait pas ce parc, c'était peut-être parce qu'il ne l'aimait pas, ou ne s'y intéressait pas. Alors voulait-il vivre ce voyage dans le temps avec moi, ou devrais-je me rassoir?

- Comme un genre de visite touristique ? Me demanda-t-il avec un sourire.

Il saisit ma main et je fus parcourue d'un frisson. J'avais eu un sourire et un contact en même temps, c'était trop pour mon petit coeur. Il avait l'air de ne pas savoir s'il devait s'arrêter ou accélérer, alors j'ai eu le droit au deux.
Je ne répondis pas tout de suite, naturellement, je mordais ma lèvre au point que j'étais sûre que ma dent allait y resterait accrochée. Ce qui ne m'empêcha pas de sourire.
Je pris une petite inspiration et lançai avec un sourire malicieux :

- En mieux. Puisque j'avais décidé qu'il s'agirait d'un voyage dans le temps.

Je commençai par l'entrainer dans l'allée en espérant que ce serait effectivement moins barbant pour lui qu'une visite touristique. J'étais prête à invoquer mon imagination débordante pour cela. Heureusement qu'elle ne se taisait pas souvent, celle là, d'ailleurs.
Droit devant nous se trouvait l'ange, celui que Charlie détrônait. Regarde qui je t'emmène, avais-je envie de crier pour la rendre jalouse.
Je tournais la tête vers Charlie avec un sourire grand comme une banane, encore toute heureuse de sentir sa main dans la mienne.
Ce que je pouvais être cruche! Aaah! Je m'énervais des fois.

- Tu veux commencer par la fontaine, ou on la garde pour la fin? Lui demandai-je.

[Désolée, c'est vraiment court, je sais, mais ça ira mieux quand on l'aura vraiment démarré, je pense.
Bisous, je t'aimeuh]

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- En mieux.

Mmh, de toutes façons l'idée me tente déjà. Marcher, je sais faire.
Penser, je ne veux pas. Vider une tête creuse parait fou, je sais.
Mais il ne me coutera rien d'essayer, n'est-ce pas ? Allez, pitié quoi.
Dites-moi que je n'aurai pas à saigner d'approuver ce choix.
Rien d'encombrant aujourd'hui, juste un gars vide qui porte des fringues et un sourire.
C'est ça l'image que je veux avoir de moi, rien à foutre du reste.
Je serai aujourd'hui le patron d'un dessin pas même net dans mon esprit.
Je me fais propre cobaye de mes intentions profondes. Pour recommencer.

- Tu veux commencer par la fontaine, ou on la garde pour la fin?

Voyons voir... que me disent mes yeux, maintenant ? Sourire, ange, sourire, ange.
Ashley au premier plan, statue au second. Trop tard, l'endroit est déjà marqué.
Pas au sang celui-là, mais il est imprégné malgré lui et moi, d'un souvenir.
L'endroit me rappellera à la place des mots que j'ai blessé une inconnue.
Aux larmes. Il est tard déjà dans mon esprit, le premier fantôme apparait.
Il n'est pas vieux, celui-là, mais il nous suit désormais. Je l'ai faite pleurer.
Et ça rien ni personne ne pourra l'effacer, pas même le fait que je sois désolé.

- On l'évite, l'Ange des eaux.

Parce que je les vois encore, tes perles séchées. Elles sont incrustées dans le soleil.
Pas moyen de les oublier, jamais. Je vois leur parcours laborieux, ma signature.
Trop tard, tu l'as bien choisi et il porte ton nom, l'endroit. Ashley.
Je veux qu'il devienne l'endroit où la fille que j'ai blessé m'a pardonné.
Alors on l'évite, l'Ange des eaux, comme on a la décence de m'éviter, moi.
On l'ignore doucement avec un regard en coin, on s'excuse d'être là.
On contourne son erreur en souriant bêtement et regrette d'être venu.
C'est ce qu'ils font avec moi, c'est comme ça qu'on commencera avec l'endroit.

Je m'essaie à un faible éclaircissement pour Ashley qui n'a rien demandé.
Pourquoi on l'éviterait ? Je me lève en tirant légèrement sur son bras.
Parce que je veux qu'elle ait l'impression de m'avoir aidé à me lever.
Je veux qu'elle sente l'utilité de sa présence devenue indispensable ici.
Nul besoin de déboiter son joli bras, j'exerce juste une pression, douce et franche.
Je récupère ma main avant de plonger dans une connerie de plus.

- Souvenir douloureux.

La voilà, mon explication. Je souris pour qu'elle ne cherche pas à comprendre.
Tu vois bien, que je fais semblant alors tu auras la courtoisie de ne rien dire.
Il est étrange ce mec, tu penseras. Comme tu aurais raison bon sang, vraiment.
Le souvenir douloureux c'est toi et moi, maintenant il faut réécrire l'histoire.
Guide-moi. Tu dictes, j'écris.

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- On l'évite, l'Ange des eaux.

Oh... Et dire que j'étais venu ici juste pour elle. Ce n'est pas pour faire découvrir mon passé à Charlie que j'ai décidé de venir ici. C'est pour la symbolique. Je l'interroge du regard. Il ne répond pas tout de suite. Tirant légèrement sur mon bras, il se lève puis retire sa main de dans la mienne. Dommage, ça ne m'aurait pas dérangé de la tenir plus longtemps. Au contraire. Cruche.

- Souvenir douloureux.

- Alors, nous allons commencer par l'étang, j'annonce en lui montrant le chemin opposé.

Je ne veux pas qu'il ressasse c'est souvenirs. Je veux qu'il découvre l'enfant qui est en lui, qu'il le libère. La petite fille blonde veut jouer avec le garçon aux yeux noir.

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Elle sourit, et moi je prie tous les dieux pour l'entendre rire.
N'importe quand, j'ai cette envie profonde de saisir sa voix.
Ce n'est pas soudain, c'est une envie qui traine, se plait à vivre.

Elle malmène ses jolies lèvres et je me promets de réussir à entendre son rire ici.
Sachant que mes promesses ne valent rien quand j'en suis le destinataire, je ne crains rien.
Il n'y a aura qu'un seul déçu, et Dieu sait qu'il est con, alors à quoi bon s'acharner ?
J'essaierai néanmoins, sentant que n'avoir rien à perdre est une bonne motivation.
L'entendre rire à mes dépends jusqu'à trouver en elle la bande son d'une vie.

- Alors, nous allons commencer par l'étang.

L'idée me plait et j'en regrette l'absence de guitare, instrument divin au paradis.
J'ignore où se trouve le dit étang, ainsi laisse-je Ashley être mes jambes, la suivant.
J'aimerais qu'elle traine mon corps à travers des kilomètres, le laissant souffrir.
Il faut que l'enveloppe souffre avant que le mental ne puisse prendre du répit.
Marcher, courir, voler, mourir... n'importe quoi. Nomme-le, je jure que je le ferai.

- Après vous, très chère.

J'esquisse une courbette révérencieuse en l'invitant à ouvrir la marche du siècle.
Sourire au poing, je sens l'impatience venimeuse raviver un être perdu : moi.
Putain mais j'étais où, tout ce temps-là ? Ah ouais, en taule, c'est vrai.

J'emboite le pas, contredisant complètement mes paroles, suivant un instinct oublié.
J'ai juste envie aujourd'hui. Je ne vais pas bien mais j'ai réellement envie.
Ouais, je pourrais vomir d'aller aussi mal, cet après-midi. Rien à foutre.
J'enterre momentanément tous les maux que je m'inflige, avec le passé.
Aujourd'hui, c'est elle et moi. Son sourire et l'encre de mes doigts.

Invité Invité

Je ne me sens plus du tout gauche, j'ai l'impression d'être de nouveau une petite fille, dans ce parc. Et je veux entrainer Charlie à ma suite. Allez, Charlie revient en enfance, avec moi. Cours sur cette brèche temporelle que je t'ouvre, de sorte qu'on ne puisse plus distinguer le petit garçon de l'homme. Je t'offre une place dans mon monde imaginaire, comme je le fais pour tant d'autres. Tu peux prendre le vol, l'avion n'attends que toi. Même pas besoin de poussière d'atmosphère. Si la fée est en vacances, le voyage continuera. Tu me suis?

- Après vous, très chère. Dit-il avec une révérence.

- Je vais te raconter l'histoire de cet étang, revisité par mes frères. Tu sais, il y a eu de sanglantes batailles, ici. Je dis d'un air sérieux et mystérieux.

Souris, Charlie, et imagines. Tu peux même écrire l'histoire avec moi, si tu veux.

Invité Invité

Je jette un regard par dessus mon épaule, attrape son sourire.
Entourée par des éclats de lumière dorée, elle resplendit.
J'aimerais accrocher son bras, la toucher, la savoir avec moi.
Mais je ne l'effleure pas, me tais et la suis en la devançant.

Les bruits et odeurs de l'élément qui nous attend parviennent à nous.
L'eau, imperturbable, s'étend plus majestueuse que prévue.
Et tandis que je sens que ma mère aurait adoré l'endroit, Ashley s'assoit.
Je fais écho à son sourire qui finira par s'épuiser. Je le perds déjà.

Mon cœur s'assombrit dans un sursaut de curiosité juvénile.
J'entends, puisqu'elle me parle, le début d'un long voyage.

- Je vais te raconter l'histoire de cet étang, revisité par mes frères. Tu sais, il y a eu de sanglantes batailles, ici.

Séduit par son air sérieux sans être fermé, je prends part au mystère.

Aujourd'hui tout est différent, je ne le sens pas, je choisis.
Je ne penserai pas au sang, justement, qu'ont perdu mes parents.
Ne me lamenterai pas sur celui que j'ai perdu dans des combats
qui n'en étaient pas pour moi, n'épiloguerai pas sur les morts
dont j'ai été acteur ou témoin, ne tremblerait pas d'être moi.
Non, aujourd'hui est un jour qu'elle écrit. Tout est différent.

Je m'assoies face à Ashley qui décidera du cours de ma vie.
Chacun de ses mots, gestes, pensées... emprisonne ma destiné.
Je choisirai un chemin tracé, ayant sa voix pour seul guide.

J'emprunte sa main dans un sursaut de courage. Parce que j'en ai envie.
La serrant dans la mienne, je m'immisce dans son monde fait de mystères.
Je me convaincs que ce contact est ma vie, ma loi, mon âme et ma foi.
Ne me lâche pas, parce que mes yeux te supplient de me laisser tomber.

- Ah oui ? que je te souris.

Je cherche à mêler mon absence de vie ici à son plein de mémoires vives.
Inventer les souvenirs brûlés d'un éternel gamin qui a mal vécu, voilà.
Y'a-t-il une place pour un mini Charlie dans les temps fermés du passé ?

- Et des jolies histoires, il y en a aussi ?

Invité Invité

- Ah oui ?

Quoi? Qu'est ce que je disais déjà? Ah « batailles sanglantes ». S'il te plaît, laisse moi le temps de me remettre de mes émotions, avant de demander des précisions, j'ai la gorge un petit peu serrée, là. Je me sens tellement cruche, là, maintenant, que j'en aurais presque honte de réagir comme ça. La vérité, c'est que Charlie a un impacte qu'encore personne n'avait jamais eu sur moi. J'ai l'impression que tous ses gestes, tout ce qu'il dit est presque comme un cadeau. Toutes ses attentions en sont définitivement. Il me fait de l'effet, le nier serait mentir, et je ne sais pas du tout mentir. Je me sens légèrement comme... Je n'ai pas d'équivalence. Je pense que pour la peine, l'on pourrait presque me comparer à une paysanne rencontrant Mr. Darcy ou Mr. Knightley. Charlie ne possède certes pas le mêmes genre de charisme que ces deux personnages d'Austen, mais il a la même puissance, intimidante et fascinante. Pour faire cours, Charlie fascine, par son regard, son sourire, sa souffrance. Même s'il n'était pas de taille imposante, je me sentirais quand même aussi petite, face à lui.

- Et des jolies histoires, il y en a aussi ?

- Mieux que de jolies histoires, des histoires magiques. Je dis avec un sourire que je sais enfantin que je n'aurais pas voulu autrement.

Je sers sa main pour être sûre qu'il ne me lâchera pas au moment où je m'y attendrais le moins et souris d'un air mystérieux. La plus belle histoire, de toutes façons, c'est maintenant que je la vis.

- Tu veux en connaître l'une d'entre elle? Une histoire de magie, avec des fées? Une histoire vraie, en plus!

Vraie, sauf que je ne suis ni une princesse, ni quoi que ce soit dans ce goût là.

Invité Invité

[ Je ne m'attendais pas à une réponse aussi rapide, je suis contente ! Very Happy

Je file voir Merlin après t'avoir répondu, tu m'inspires trop pour attendre <3 ]

Partant du principe que je suis redevenu le gamin que je n'ai jamais cessé d'être,
j'adopte sa peur du sang lorsqu'il avait dix ans, et l'appréhension de toutes les nuits.
Je ne suis plus totalement lui, l'enfant a grandit. Putain, il s'en passe des choses en deux ans...

- Mieux que de jolies histoires, des histoires magiques.

J'adore le sourire qui court sur ses lèvres qui savent rêver. J'adore y voir la vie.
Je me hais un peu plus de ne pas savoir voyager, ignorant tout de la magie.
Aussi traitre que l'espoir, la magie reste pour moi un mystère à jamais illusoire.
Elle est cette trainée pudique qui exhibe son talent comme l'on vend du rêve,
qui se pavane sur le boulevard des gens inspirés pour leur insuffler une utopie,
qui m'évite soigneusement depuis vingt six ans, teste le trou qu'englobe ma tête,
qui se plait à embrasser les heureux bâtards de son accoucheuse de fée... paumé.
La magie ne veut pas de Charlie aussi vrai qu'il ne mérite plus d'espérer la croiser.

Ashley. Sa main dans la mienne et le monde pour témoin d'une scène inédite.
Deux enfants enfermés dans une bulle intemporelle que ma bêtise viendra briser.
J'évite, puisque j'en ai l'infime pouvoir, de me laisser aller à ces sombres pensées.
Laissant s'évaporer un minimum de chagrin, j'aperçois le sourire qui me tient.

- Tu veux en connaître l'une d'entre elle? Une histoire de magie, avec des fées? Une histoire vraie, en plus!

Parce qu'entendre l'histoire vraie d'un acte magique est ma seule chance,
et je le sais, de l'approcher un jour, je n'hésite pas. Son enthousiasme suffira.
Les fées, ces jolies petites choses que peignent les enfants dans leurs songes,
qu'enferment les évadés dans des histoires trop jolies pour durer... les fées.

Et il est temps de me familiariser avec leurs contes que je n'ai jamais eu le temps d'apprivoiser.
J'attends le récit de celle qui, à sa guise, décidera de mes aveux.

- Chante-la moi, je souris dans un murmure, préférant le chant au verbe 'conter'.

Je meurs d'envie de croire qu'un jour, quelque part... "ils vécurent heureux".

[ iTunes me diffuse What about now ? alors que j'écris, et ce depuis mon point final <3 ]

Invité Invité

J'ignore encore quelle histoire je vais raconter, je ne m'en souviens que dans les grandes lignes. Je me suis lancé dans une entreprise assez périlleuse et je ne m'en rend compte que maintenant. Je sais que je vais perdre mes moyens avec Charlie, puisque même au téléphone, je me retrouve à faire des mimes. J'ai toujours su réciter des contes, c'est ma vocations. Mon père passait son temps à le faire, c'est héréditaire. Mais Charlie a une présence qui m'emporte beaucoup trop loin pour que je puisse penser.

- Chante-la moi.

- Chanter... Hum...

Comment pourrais-je formuler ça?... Un truc qui ressemblerait à "c'est plus ton truc en plus t'as promis" sans que ça paraisse insistant. Je ne veux surtout pas le brusquer alors que tout va bien. Alors je serre encore sa main, pour qu'il ne me lâche pas une fois ma question posée.

- C'est pas toi qui devais chanter? Je dis avec un grand sourire, pour faire passer la pilule.

Et ne me dis pas que tu ne peux pas sans guitare, je sais où en trouver....

Invité Invité

Trompe-moi, la vie t'en supplie. Mens-moi comme une effrontée,
effraie mon chagrin et fais-moi croire au paradis. Je vais sombrer.
Et parce que je flirte avec le précipice au lieu de t'apprivoiser,
le monde te regarde pour que je prenne enfin le voile des fées.

Soulève le mystère, enrobe -le d'amour et régale mes pupilles ardentes.
J'ai ce besoin inavouable d'entendre un ramassis de conneries.
Joue avec mes sens et profite de ma volontaire naïveté, offerte.
Ashley, lis dans mes putains d'yeux brûlés et entame un couplet.

N'importe lequel, tout ce que tu voudras. Élude simplement les suicidés.
Laisse les vivants mourir de mal aimer, et mens-moi par une acrobatie.
Amuse-toi de moi, je ne réclame rien et exige tout de ces mystères inventés.
La légèreté d'un univers parallèle au mien vient déjà en lécher les contours.

Mais je sais, puisqu'est là ma vie, qu'aucun de mes souhaits ne sera ici accompli.
Au revoir, mes douces utopies, perdues au creux d'un moment trop bien dessiné.
Ce fut une torture de vous imaginer, vous trainant dans une mare de rêves exhaussés.
A jamais, mes envies de peines allégées, à croire que l'enfer m'est voué tout entier.

Je compte, lentement, les secondes de silence qui berce le dernier échos de ma voix.
Plongé entre l'attente d'une note de son cristal et la récente mort de mon Eldorado,
j'attends avec une patience feinte que la belle enfant parle enfin. Pour faire ce que je sais.
Mon cœur retient un battement qu'il lance contre mon crâne, appréhendant la fin.
Elle va massacrer les fées, égorger mes envies de légèreté et me faire abdiquer, avec un mot.

Parce que j'ai pas écris le premier de ma vie.

- Chanter... Hum...

Et je sais à son air si doux qu'il me dérange, que l'anéantissement commence maintenant.
Je présage le pire, sachant que rêver n'est pas permis aux prisonniers. Je dis, jamais.
Ses efforts ne compensent pas mes défaillances, son sourire laisse les fées s'envoler.
Putain Charlie, tu comprends toujours pas qu'on est en train de changer de sujet ?

- C'est pas toi qui devais chanter ?

Dans ta gueule de paumé. Avale son adorable cachet, elle va vite tout deviner.

J'écris là un livre plus grand que celui qu'elle lira au cours de ses jolies études.
Mon personnage à l'apparition singulière ne sait pas encore que le sort, ce farceur,
lui réserve la plus tordue des raclées. Ils ne sont pas encore tous morts, tu sais ?

Et qu'est-ce qu'il lui répond, le clochard adopté à la princesse aventurée au cœur
d'un univers si sombre et morbide qu'il finirait par l'étouffer ? C'est quelle page déjà ?

Sincèrement perdu, je laisse mes yeux se balader entre les siens, lorgne sur ses lèvres.
Je cherche un mot, n'importe lequel pourvu qu'il puisse m'aider à m'échapper.
Abandonné sur le dernier quai, je ne suis plus le rythme imposé par son charme.

Je jurerais que, trop obsédé par ma personne et ses putains de pensées,
j'ai manqué une étape importante entre sa bouche et les mots qui y sont passés.
Sourd aux complaintes des affamés, je n'entends que mon échos éreinté.
Même ma conscience se traine derrière le reste de mes objets égarés.

Je perds sa main parce que la mienne vient se river sur mes yeux rougis par la nuit.
C'est normal, de subir un décalage avec son propre pays ? Chanter, toute la vie.

- Je n'sais pas.

Incapable, jusqu'au plus profond de ce qu'il reste de moi, je n'interprète pas mes choix.
Je ne sais pas chanter, ne sais même plus aligner deux mots follement inspirés.
Le chant, parce qu'artistique, n'est depuis très longtemps, plus à ma petite petite portée.

Et je ne sais plus, si c'était à moi de chanter. Je ne comprends plus. Ai-je promis ?
Je crois, parce que telle est ma connerie, avoir avoué être enchanté par sa voix.

Des accords étaient venus jusqu'à moi, s'accrochant à ses syllabes. Je me souviens déjà.
Une modeste symphonie qui, couchée sur un papier, réclamait un peu d'attention.
Je ne suis pas le génie de la chanson mort d'être incompris. Il a tout laissé derrière lui.
Des mots par-ci, avaient entamés la première strophe d'une injuste mélodie.
Ceux de par-là pouvaient compléter mon absence de talent propre et satisfait.

Hier encore, mon sommeil cherchait le refrain d'une histoire que je ne connais pas.
Mes songes cherchaient en vain le cœur d'un récit un peu trop grand pour moi.
Tout ce qui, irrévocablement, noircissait mon maigre scénario, c'était ma loi.
Ma vie, l'essence de mes doigts, le passé d'un connard roi, et le moindre de mes pas.

Je savais à m'entendre que j'étais le frein d'une valse qui ne savait pas danser.
Parce que boiteux dès le premier compte de trois, je m'affale sur ma rivale.
Désolé, ma trop douce, trop douce Ashley. Je ne sais plus rêver.

- ...comment chanter une histoire qui n'a qu'un seul couplet ?

C'est toi la première, qui a choisit de nous éloigner des fées.

Invité Invité

- Je n'sais pas.

- ...comment chanter une histoire qui n'a qu'un seul couplet ?

- Hum... J'acquiesce une nouvelle fois à sa question qui n'attends pas vraiment de réponse. Désolée, j'ai tendance à facilement me laisser distraire. Je le fais tout le temps, c'est un de mes défauts. Je pars sur un truc, et un autre me traverse l'esprit, je le dis avant d'oublier. Mon père m'appelle la girouette, parce que je n'arrive pas à rester concentrée sur un seul sujet. Regarde, je recommence.

Je soupire, souriant toujours, j'aimerais qu'il m'interrompe, qu'il arrête la diarrhée verbale qui s'échappe de ma bouche. Ne serait-ce pour que j'ai le temps de reprendre mon souffle, pour que mes mains arrête de bouger toutes seules, mais surtout pour arrêter de passer pour une idiote. Je préfère parler plutôt que de laisser un silence gênant s'installer entre nous. Je suis en guerre contre le silence. Il me fait peur.

- Tu me préviendras quand la chanson sera finie, pas vrai? Enfin, ne te sens pas obligé, hein.

Invité Invité

Et si l'on retrouve après nous un vieux bouquin usé, que tes enfants ne s'étonnent pas
d'y trouver tous les mots qu'aura inspiré leur mère à un crétin désabusé, griffonné.
Parce qu'il m'est possible d'écrire sur un cahier tout ce que je ne chanterai pas, jamais.
Le refrain de ma mélancolie, c'est moi et cette vérité me débecte, tant elle est injuste.
Mon monde devrait virevolter autour des autres, s'accrocher aux rayons d'un soleil radieux.

Toujours résolu à me défaire de moi, je cherche un moyen d'échapper à mes pensées.
Je veux ne plus être en état de formuler des souhaits, ne plus m'entendre et m'évanouir
de savoir que je suis enfin parvenu à écouter pour de vrai, à comprendre les mots d'un autre.

- Hum... Désolée, j'ai tendance à facilement me laisser distraire. Je le fais tout le temps, c'est un de mes défauts. Je pars sur un truc, et un autre me traverse l'esprit, je le dis avant d'oublier. Mon père m'appelle la girouette, parce que je n'arrive pas à rester concentrée sur un seul sujet. Regarde, je recommence, son soupire me gène. Tu me préviendras quand la chanson sera finie, pas vrai? Enfin, ne te sens pas obligé, hein.

Je suis choqué et cette révolution ébranle chacune de mes pensées involontaires.
Là, maintenant, la formulation d'un souhait muet est devenue réalité. Exhaussé ?
Je voulais écouter, entendre sans n'avoir à me forcer, accoudé à un bois usé.

Alors c'est à ça que ressemblent les vœux, lorsqu'ils nous quittent pour un autre ?
En une minute ils éblouissent votre vue et laisse dans votre cœur cette impression
si forte de regret... j'aimerais qu'il soit resté. Il me manque et j'ai besoin de rêver.
Je ne sais pas me perdre dans les fantasmes désuets d'une vie meilleure et aveuglée.
Que les étoiles m'aident, plutôt que de me déserter. Je n'attrape pas même mes souhaits.

Je me sens piégé, j'aurais voulu la couper, rebondir sur chacun de ses mots, parler.
Dès que sa voix allait chercher un peu d'air pour se revigorer, j'essayais.
Mais parce infiniment plus rapide que moi, Ashley a choisit de me laisser écouter.
Je regrette d'avoir perdu toutes ces occasions d'approcher ses aveux, de les cajoler.

Mon souhait d'entendre réalisé, je ne sais pas comment le rappeler, je le pleure déjà.
Puisque les choses tournent ainsi, j'inverse le manège et adopte la surdité. Je ne peux pas.

- C'est toi qui devrait l'écrire, cette chanson-là. Finalement je ne suis que le fond, les notes qui cherchent les mots que toi, tu trouves si bien.

Invité Invité

- C'est toi qui devrait l'écrire, cette chanson-là. Finalement je ne suis que le fond, les notes qui cherchent les mots que toi, tu trouves si bien.

- Il faudra m'apprendre, moi je sais juste raconter les histoires. Je dis dans un sourire éclatant.

- Je compte sur toi. J'ajoute avec un sourire d'enfant.

Invité Invité

Ashley, écris toutes les strophes que le soleil souffle à ton oreille endormie.
Je t'en supplie, cajole tes rêves et transmets-les à tous ces géants de papier.
Accouche ta plume de tous ces mots qui me sourient, même s'ils sont partis.
Conserve-les en ton sein, protège ton ventre des abominations de mon mental.
Ne dérange pas les fées, soigne leurs ailes et panse toutes leurs plaies.

Il faut, puisque l'équilibre le réclame, qu'une part de l'immense talent qu'elle détient
soit utile au réconfort dans la lutte qu'il mène contre le chagrin. Il la veut pour alliée.
L'évasion de la peine attend que ton sourire accélère son envolée. Chasse-les.

- Il faudra m'apprendre, moi je sais juste raconter les histoires.

Ses lèvres s'étirent enfin dans cette caresse que j'apprends à apprivoiser.
Dieu que ce sourire est charmant. On pourrait lire sur un visage aussi rayonnant.

J'ai envie de lui dire, subitement, qu'écrire et raconter sont deux frères qu'on a séparé.
Que les chansons sont les caprices des conteurs qui font rêver et savent voler.
Que chanter, c'est raconter tout ce qu'on a pas le courage de soumettre aux yeux des autres.
Que ma voix ne tremble pas, contrairement à mes doigts qui comblent le blanc d'incertitudes.
Savoir raconter, c'est pourvoir écrire la plus grande des chansons, si elle savait.
Mais dire, je n'en ai pas le temps. Alors putain, le pouvoir qu'elle détient....

- Je compte sur toi.

Sait-elle que son aveu berce mon cœur de tendres promesses ?
A-t-elle conscience de l'infinie douceur dans sa voix, à ce moment-là ?
Pense-t-elle encore à quel point elle me haïssait quand je l'ai faite pleurer ?

Redevable jusqu'à en mourir, j'endette âme et corps, met mon être aux enchères.
Tout doit disparaitre. J'offre ma brocante de carcasse au moins offrant. Maintenant.
Bien sûr, qu'elle peut compter sur moi, je le sens jusqu'au fond de mon cœur ardent.
Je cesserai de la soutenir le jour où mes épaules céderont de trop avoir à porter.
Mais qu'y-a-t-il plus bas que la marrée, sous les océans, dans le ventre des volcans ?
Je suis la lave enragée du monde sur laquelle s'affaissera tout un monde et ses vies.
Boufferai volontiers quelques décennies de plus, sous peine que meurt la maladie.

- Merci, je souris à ses yeux.

Et la douce symphonie de reprendre. Je respire, librement.
Vivre dans l'instant, c'est ce qu'il disait tout le temps, pas vrai ?
Alors voilà, papa. Par amour et respect de toi, j'obéirai.
Parce que cet instant en particuliers m'inspire tout un sonnet.
Que le passé épaissie ma vue de ses quelques atrocités.
Mais à quoi bon la mort sinon amplifier la valeur de la vie ?
Putain maman, pourquoi j'entends encore tes chansons ?

Je décide maintenant que n'importe rien sinon le présent. Je cesse de guetter mon Armageddon.
La fin du monde selon un con, ce ne sera pas pour aujourd'hui. Peut-être pleurerai-je cette révélation.
Chut, non, maintenant. Pense à l'instant et coupe ce qui alimente tes réflexions.

Je me focalise sur la soirée qui viendra, le temps alors figé, et puis Sofia.
Reviens au présent, adore les facettes de mon actualité, cesse de calculer.
Évidemment, que tout ira bien. Ils te prendraient qui maintenant, ton chien ?

- Putain, mon chien !

Invité Invité

- Merci

- Putain, mon chien !

- Désolée... Je parviens à articuler en tentant de reprendre ma respiration.

- On a plus... de points... communs que je le pensais, la girouette.

Je ris à nouveau moins longtemps cette fois.

-Désolée, tu disais donc? Ton chien?

Invité Invité

Mon cabot, ma rage abîmée. Mon meilleur ami, l'unique recueil de mon passé. Ce chien.
Je sens ma gorge étriquée par un soudain renvoi de culpabilité. Parce que, putain...
Il est mon ultime responsabilité, le témoin de mon parcours entier, les yeux de ma vie.
Je caresse chaque jour son cœur du mien et j'ai juré que celui-ci n'y changerait rien.

Chaque soir la peur infiltre mon ventre pour s'y loger chaudement, dresse son campement.
J'en viens à souhaiter crever avant lui pour ne pas avoir à supporter le vide que léguerait sa perte.
La perspective de l'abandonner à la douceur de Sofia répercute l'idée de la laisser regarder.
Mais j'ai depuis le premier regard promis à son être qu'il ne verrait plus le mien trébucher.

Et ce chien qui m'a adopté, je sais que je lui dois un vaccin cet après-midi, je lui ai garanti.
Qu'on ne vienne pas me cracher qu'il n'y comprend rien. Il est plus lucide que la moitié
des habitants de cette ville empoisonnée par sa propre chaleur. Dieu, ce qu'il a souffert.

Le rire d'Ashley me percute tant il me surprend. Je ne l'avais pas vu venir, tout à ma connerie.
Je la trouve belle ainsi animée d'une émotion toute particulière, sa sincérité me touche.
J'en suis au point de me foutre qu'elle se moque de moi ou non, je parierais que je l'ai cherché.
Son rire réveille l'étang paresseux comme il me claque au corps. Sa voix imprime ma chair.

Je sais à le découvrir que je ne me lasserai jamais de l'entendre. Ces choses se sentent.
Un sourire m'échappe, incontrôlé, et capture mes lèvres qu'il refuse de quitter.
Le spectacle de son soudain fou rire attise la tendresse de ma voix pour la sienne.
Je sens la chaleur de ses pensées qui se bousculent et ne pas les connaitre me plait.

Mes yeux conservent la surprise qui les a éveillé et je remarque mes mains levées.
J'espionne ses mouvements afin de pouvoir la rattraper, prévenir une chute qui la blesserait.
Elle essaie de parler dans sa transe et même si la cause de son hilarité creuse une incertitude,
je ne peux retenir mon sourire qui, en pale échos du sien, chante de se savoir inchangé.

- On a plus... de points... communs que je le pensais, la girouette.

Je sens mes sourcils s'arquer dans une moue que je sais aussi attendrie qu'hésitante.
Désolé putain, mais je ne suis pas certain de saisir la grandeur d'un moment raté.
J'aurais du rire aussi, je le sais. C'est juste que voilà, c'est une des choses que j'ai perdu.
Tout ce qui me reste sont les poussières de ma voix d'enfant. Quelques éclats par-ci, par-là.

-Désolée, tu disais donc? Ton chien?

Un autre de ses rires m'a échappé. Putain, mais à quoi elle me servent mes pensées ?
Je suis résolu désormais à essayer, si fort que j'en aurais mal, qui s'en soucie ?
Ouais Ashley, je promets. Ris encore et peut-être que je percevrai ce qui me manque.

Je disais donc, mon chien. Putain, mon chien....
Ses yeux ne sont pas encore de retour, mais la vie en eux m'ébouriffe.
Ashley est belle, et le réaliser seulement maintenant me surprend.

- Mmh... oui. Je dois l'emmener se faire vacciner.

Tss, bien sûr que je ne rirai pas. La plus grosse blague ici, c'est moi. Et rien ne vient.
Je suis confronté chaque jour à ma propre connerie mais elle ne me touche plus, finie.
Merde, j'ai perdu avec un nouveau regret ce qui fait de moi un con de gamin.
Si mon image ne suffit pas à fendre ma gueule d'un rire moqueur, on ne peut rien pour moi.
J'aurais adoré rire avec toi. Sache que seulement qu'on ne rééduque pas ces choses-là.

- Tu viendrais avec moi ?

Invité Invité

- Mmh...

Oh mon Dieu, arrête de faire ça !! Mon coeur a eu un raté.

- Oui. Je dois l'emmener se faire vacciner.

- Tu viendrais avec moi ?

- Bien sûr que oui ! Je réponds sans même l'ombre de la moindre hésitation.

- C'est maintenant ? Je demande avec un grand sourire enthousiaste et impatient, les mains par terre, prête à me lever.

Invité Invité

- Bien sûr que oui !

Wow, j'en souris de tout mon cœur choqué. Touché, comme disent les français.
La spontanéité de sa joie s'échappe de ses lèvres pour venir caresser les miennes.
Soulagé, je sens encore mon usuel chagrin se disputer l'attention de mes pensées.
Est-ce que le monde s'écroulera si Charlie essaie de rire, rien qu'une fois ?

Une odeur lointaine accapare ma tendresse, pendant une poussière de seconde.
Le mot français, je ne l'ai pas appris à la grand école de la vie derrière les barreaux.
Je ne l'ai pas connu grâce à une énième nuit d'errance dans les rues non plus.
Mes mains en témoignent comme elles se souviennent des rides de mon cœur.
C'était ma grand-mère, qui murmurait quelques mots étrangers pour voler de la noblesse
à ceux que moi, je dévalisais en secret de leurs bouffe, de leur monnaie. Je saigne encore.

- C'est maintenant ?

Je souris toujours comme je n'ai jamais cessé de pleurer. Je sens mes lèvres étirées.
Une fissure enfoncée dans l'âme, je m'attendrie du présent que m'offre Ashley.
J'avoue ne pas avoir connaissance du 'maintenant' qu'elle peint de sa voix.
Alors je me permets sachant que je ne devrais pas, de poser mes mains sur son corps.
Je caresse ses poignets du bout de mes doigts, cherche à y deviner une montre, un objet.

Il serait pourtant plus simple de parler, de demander, et même de chanter.
Qui a dit que je me fiais à la simplicité, moi roi des cons, ascendant demeuré ?
Je libère ses vêtements de mon intrusion, refuse toutes les fouilles de mes comparaisons.

L'heure ne court ni sur elle, ni contre moi. Alors je lève les yeux contre le ciel froid.
Je cherche comme on me l'a appris, le soleil près de son zénith, et mon Ouest étranger.
Le feu me souffle qu'il n'est pas encore 14h, et les souvenirs mangent le reste de mes brulures.

Ce tour-là vient du côté sombre de mon vécu, des ténèbres de mon enfer blanc.
Je ne m'y attarde pas, au risque d'y laisser plusieurs dents. Fatigué de narrer.

- Le ciel dit qu'on a encore une heure avant de le retrouver.

Je ne souris plus, je m'en rends compte sans savoir trop comment, mais je sens.
Le soleil chante que l'on peut prendre le temps de marcher pour mieux se perdre.
J'ignore à quelle ombre j'ai abandonné mon sourire, le confort de ses yeux me plait.

- Et qu'il n'a jamais entendu un rire aussi joli.

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